La demande en indemnité par le contribuable pour faute de l’administration fiscale – un nouveau cas d’application récent
La demande en indemnité par le contribuable pour faute de l’administration fiscale – un nouveau cas d’application récent
Lorsque l’administration fiscale commet une faute dans le calcul de l’impôt, une faute dans l’établissement ou le recouvrement de l’impôt, le contribuable peut demander l’indemnisation du préjudice subit
L’action indemnitaire du contribuable peut aussi être engagée en cas de carence ou de retard de l’administration dans la délivrance d’un certificat de résidence fiscale.
Quels sont les cas concrets d’application et comment procéder ?
L’action en responsabilité de l’État pour faute de l’administration fiscale est un cas concret de protection des droits des contribuables. Cette action est souvent méconnue du contribuable.
Et cela à tort puisque l’exigence la faute lourde n’est plus exigée et une faute simple suffit (CE 21 mars 2011 n° 306225, Krupa).
Dans une affaire récente (arrêt du Conseil d’Etat du 2 juin 2025, n°491270), un nouveau cas d’application a été être admis au profit du contribuable.
- Les conditions d’engagement de la responsabilité de l’État
1. L’existence d’une faute
La faute peut résulter de :
· décisions illégales tel le refus d’agrément, une mauvaise interprétation de la loi fiscale ;
· d’erreurs matérielles : double imposition, retard dans le remboursement de crédits de TVA ;
· recouvrements irréguliers : avis à tiers détenteur abusifs, saisies conservatoires injustifiées ;
· retards fautifs tel que la délivrance tardive d’une attestation fiscale, le traitement anormalement long d’une demande de remboursement d’un crédit de TVA.
Autre exemples concrets de fautes engageant la responsabilité de l'État :
· défaut ou délivrance tardive d’une attestation fiscale (certificat nécessaire au remboursement d’un d’impôt étranger payé à une administration fiscale étrangère),
· envoi de documents fiscaux à un tiers ;
· détermination erronée de l'assiette de l'impôt ;
· recouvrement forcé d'impositions non exigibles ;
· omission d’adresser au contribuable la lettre de rappel prévue avant un commandement de payer.
2. Le préjudice indemnisable
Le seul paiement de l’impôt ne suffit pas à caractériser un préjudice. En effet, si l’impôt a été payé à tort mais qu’il est ultérieurement restitué avec les intérêts moratoires (les intérêts moratoires sont dus par l’Etat au contribuable), le contribuable n’a pas droit à une indemnisation supplémentaire.
En revanche, la perte de chance d’obtenir le remboursement d’impôt est un préjudice indemnisable.
Pour obtenir réparation, il faut donc établir un préjudice distinct du paiement lui-même.
Et le contribuable peut invoquer des préjudices très divers :
· la perte de chance d’obtenir le remboursement d’un impôt auprès d’une administration fiscale étrangère ;
· la perte de chance d’obtenir la réduction ou l’exonération d’une retenue à la source ;
· les préjudices financiers liés à des retards de remboursement d’un crédit de TVA ;
· la prise de garanties injustifiées et de vente forcées de biens immobiliers ou mobiliers ;
· la liquidation judiciaire d’une entreprise ;
· la perte d’un fonds de commerce et indemnités versées au personnel ;
· la perte de revenus ou de droits ;
· la baisse de chiffre d’affaires avec la perte d’un client ;
· l’atteinte à la réputation ou à l’honneur, la santé dégradée et d’une manière générale, les troubles dans les conditions d’existence constituent également un préjudice.
3. Le lien de causalité direct
La réparation suppose que le dommage découle directement de la faute commise par l’administration.
- Les causes d’atténuation ou d’exonération
Toutefois, dans les situations suivantes, l’administration peut limiter ou écarter sa responsabilité si elle démontre :
1. La faute du contribuable
L’administration peut opposer la négligence ou la mauvaise foi du contribuable : déclarations tardives, erreurs comptables, opposition à un contrôle fiscal.
2. L’imposition inévitable
Aucune indemnisation n’est accordée si l’administration démontre que l’impôt aurait été dû en tout état de cause, même si la procédure était irrégulière.
3. Le partage de responsabilité
Dans certains cas, le juge retient un partage de responsabilité, réduisant l’indemnisation lorsque le contribuable a contribué à son propre préjudice.
- Une illustration récente dans laquelle la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat pour faute causée à un contribuable a été reconnue : l’affaire B… arrêt du Conseil d’Etat du 2 juin 2025 (CE, 2 juin 2025, n° 491270)
Dans cette affaire, des contribuables résidents fiscaux français avaient perçus des dividendes de source suisse soumis à une retenue à la source en suisse de 35 %. Pour obtenir un remboursement partiel de l’impôt suisse, conformément à la convention fiscale franco-suisse, ils devaient présenter un formulaire certifié par l’administration française (attestation de leur résidence fiscale et de leur assujettissement à l’impôt sur le revenu en France).
Or, ce document leur a été adressé par l’administration fiscale française tardivement, c’est-à-dire après l’expiration du délai de réclamation fixé par la Suisse. Leur demande de remboursement fut donc rejetée par la Suisse.
Le Conseil d’État a considéré que :
· le retard de l’administration constituait une faute,
· la cour administrative d’appel de Nancy avait commis une erreur de droit en exonérant l’administration de toute responsabilité (les intéressés avaient commis des négligences parallèles jugée mineures ou inopérantes par le juge : retard de déclaration en France des dividendes de source suisse, ils avaient également tardé à relancer l’administration fiscale française du défaut de délivrance du certificat fiscal ; mais ces circonstances n’ont pas été retenues).
Cette jurisprudence parait tout à fait tranposable au cas d’un résident fiscal français percevant des dividendes ou revenus de capitaux mobiliers, des droits d’auteur, redevances ou royalties de source étrangère donnant lieu dans le pays de la source à une retenue à la source qui peut être réduite ou exonérée par l’effet des dispositions de la convention fiscale applicable et dont l’exonération ou la réduction est conditionnée par la délivrance d’un certificat de résidence fiscale par l’administration fiscale française.
Dans l’hypothèse où le contribuable n’aurait pas pu bénéficier de l’exonéoration prévue par la convention ou de la réduction du taux de l’impôt payé dans le pays de la source, en raison du défaut ou du retard de délivrance d’un certificat de résidence imputable à l’administration française, la faute ainsi commise pourrait justifier une action indemnitaire contre l’Etat.
L’action indemnitaire est ouverture aux résidents comme aux non-résidents, aux particuliers comme aux entreprises et sociétés.
- L’action indemnitaire contre l’Etat en cas de faute de l’administration fiscale est une procédure souvent méconnue du contribuable résident ou non-résident lésé, alors que l’enjeux financier peut parfois être significatif
Les actions indemnitaires peuvent représenter des enjeux financiers significatifs, tant pour les contribuables que pour l’État. Cette évolution incite l’administration fiscale à renforcer sa vigilance, tandis que les contribuables disposent d’un levier juridique plus accessible pour obtenir réparation.
- Comment procéder
En cas de faute commise par l’administration fiscale ayant entrainé un préjudice financier indemnisable, votre avocat vous accompagne pour étudier et préparer votre dossier en réparation et vous accompagne sur toute la procédure contentieuse indemnitaire :
· rédaction d’une réclamation indemnitaire préalable auprès de l’administration,
· et en cas de refus (décision explicite ou implicite), la juridiction administrative est saisie d’une action indemnitaire.
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